Afin de produire de l’hydroélectricité avec son moulin à eau, et même si l’eau est immédiatement restituée au milieu naturel sans aucun prélèvement, un arrêté préfectoral est obligatoire pour exploiter la force motrice de l’eau.
Afin d’obtenir un arrêté préfectoral pour une installation hydroélectrique, deux cas de figure existent :
Création d’une nouvelle centrale : nécessité de réalisation une demande d’autorisation environnementale afin d’obtenir l’arrêté préfectoral autorisant l’exploitation de la force motrice de l’eau pour produire de l’hydroélectricité
Remise en service d’une ancienne installation hydraulique : dans ce cas de figure, qui concerne les moulins, une réactualisation de l’ancien droit d’eau est possible (abordé dans la suite de l’article)
La réalisation d’une nouvelle demande d’autorisation environnementale n’étant pas nécessaire sur les anciennes installations hydrauliques, les porteurs de projet ont donc intérêt à chercher à repartir d’un ancien droit d’eau pour éviter de longues et coûteuses démarches administratives. On vous dit tout sur le droit d'eau d'un moulin à eau.
Vérifier l'existence du droit d'eau d'un moulin
Différents cas de figure existent en fonction de la situation et de l'histoire de l'ouvrage hydraulique. Deux questions sont à se poser pour en savoir plus sur son moulin :
Mon moulin est-il sur un cours d’eau domanial ou non ?
En fonction de la présence du moulin sur un cours d’eau domanial ou non, la date de référence pour considérer que le moulin est fondé en titre ne sera pas la même. Pour savoir si votre cours d’eau est domanial, il est facile de faire des recherches sur internet ou de demander à la DDT/DDTM de votre département.
De quand date mon moulin à eau ?
En fonction de la date de construction du moulin, les exigences de l’administration ne seront pas les mêmes concernant le droit d’eau. Pour connaître la période de construction de votre moulin à eau, plusieurs options s'offrent à vous :
Aller voir sur la Carte de Cassini ou la Carte de Belleyme : si le moulin est présent, cela assure qu’il existait bien avant la Révolution française ;
Faire un tour aux archives départementales pour retrouver des traces du moulin et retracer son histoire (règlements d’eau, arrêtés préfectoraux, ordonnances royales etc.).
En fonction de votre réponse à ces deux questions, il est nécessaire de consulter le tableau ci-dessous pour savoir dans quel cas de figure vous vous retrouvez :
Date de construction du moulin | Mon moulin se trouve sur un cours d’eau non domanial | Mon moulin se trouve sur un cours d’eau domanial |
Avant 1566 (Edit de Moulins) | Mon moulin est fondé en titre : le moulin possède un droit d’eau inaliénable qui peut être réactualisé. Sur les cours d’eau non domaniaux, il s’agit des droits des moulins délivrés sous le régime féodal et que la nuit du 4 août 1789 de la Révolution Française n’a pas abolis. Conformément à l’article L.214-4 du code de l’Environnement, le droit d’eau fondé en titre peut être retiré ou modifié dans les cas suivants : o dans l’intérêt de la salubrité publique, et notamment lorsque ce retrait ou cette modification est nécessaire à l’alimentation en eau potable des populations. o pour prévenir ou faire cesser les inondations. o en cas de menace majeure pour le milieu aquatique, notamment lorsque ces milieux sont soumis à des conditions hydrauliques non compatibles avec leur préservation. o lorsque les ouvrages ou installations sont en état de ruine. | Mon moulin est fondé en titre : le moulin possède un droit d’eau inaliénable qui peut être réactualisé. Sur les cours d’eau domaniaux, il s’agit des droits des moulins délivrés avant l'Edit de Moulins en 1566. Conformément à l’article L.214-4 du code de l’Environnement, le droit d’eau fondé en titre peut être retiré ou modifié dans les cas suivants : o dans l’intérêt de la salubrité publique, et notamment lorsque ce retrait ou cette modification est nécessaire à l’alimentation en eau potable des populations. o pour prévenir ou faire cesser les inondations. o en cas de menace majeure pour le milieu aquatique, notamment lorsque ces milieux sont soumis à des conditions hydrauliques non compatibles avec leur préservation. o lorsque les ouvrages ou installations sont en état de ruine. |
Entre 1566 et le 4 août 1789 | Idem ci-dessus. | Le moulin ne possède pas de droit d’eau a priori. |
Après le 4 août 1789 et avant 1919 | Mon moulin est « fondé sur titre » : selon les époques, ce droit d’eau revêt la forme d’une ordonnance royale, d’un décret présidentiel ou d’un arrêté préfectoral. Il autorise la réalisation d’un ouvrage hydraulique sur un cours d’eau et en fixe la consistance légale. C’est la pièce administrative essentielle pour un ouvrage hydraulique dans la mesure où il en définit les conditions de fonctionnement (communément appelées « règlement d’eau ») : - le niveau d’eau légal maximum de retenue d’eau. - les dimensions des installations (vannes de décharge, déversoir…) - les devoirs de l’exploitant (entretien, gestion, surveillance) Tout propriétaire d’ouvrage hydraulique doit être en possession de son règlement d’eau et est tenu de faire fonctionner son ouvrage selon les conditions définies dans celui-ci, sous peine de sanctions administratives ou judiciaires. | Le moulin ne possède pas de droit d’eau a priori. |
1ère étape : montrer l'existence et consistance légale du droit d’eau
Dans les démarches nécessaires à réaliser pour réactualiser votre droit d’eau, deux points distincts sont à considérer :
Montrer l’existence d’un ancien droit d’eau :
La présence sur la Carte de Cassini dans le cas d’un cours d’eau non domanial ou l’existence d’archives (actes notariés, documents des archives départementales, registres historiques d’enregistrement des usages) suffisent à montrer l'existence d'un droit d'eau.
Évaluer la consistance légale du droit d’eau
La consistance légale, c’est la puissance (souvent exprimée en Chevaux-Vapeurs ou en kW) jusqu’à laquelle l’installation était autorisée à produire. A noter que la consistance légale est définie par le débit d’eau dérivé et la hauteur de chute que le moulin était autorisé à utiliser à l’origine de ses droits. Si aucune trace dans les archives ne permet de retrouver la consistance légale du moulin, des méthodes validées par les services de l’Etat existent pour réévaluer sa consistance légale.
En cas de doute sur la consistance légale d’un droit fondé en titre, l’autorité administrative doit apporter la preuve de non-conformité de la consistance légale déclarée par le propriétaire du moulin. A défaut, celle-ci est présumée conforme à la consistance effective constatée au moment de l’instruction de la demande de reconnaissance.
Comment faire reconnaître un droit fondé en titre auprès de l’autorité administrative ?
Une demande auprès de la DDT / DDTM de votre département, en charge de la police de l’eau, est à réaliser afin de faire reconnaître l’existence et la consistance légale de votre droit d’eau. Pour cela, il lui est nécessaire de fournir l’ensemble des éléments utiles à l’identification de l’existence légale et de la consistance légale de l’ouvrage.
Moulins Demain peut vous accompagner dans ces démarches afin de dialoguer avec les services de l’Etat et faire reconnaître l’existence et la consistance légale de votre droit d’eau, par exemple en parallèle d'une étude de faisabilité.
2ème étape : rédiger le porter à connaissance nécessaire pour obtenir l’arrêté préfectoral
Comme indiqué précédemment, le droit d’eau ne suffit pas à produire de l’hydroélectricité à partir de son moulin puisqu’il est nécessaire d’obtenir un arrêté préfectoral qui autorise le propriétaire du moulin à utiliser la force hydraulique.
Suite à la reconnaissance de l’existence et de la consistance légale de votre droit d’eau, la constitution d’un dossier de Porter à connaissance et des discussions avec les services de l’Etat sont donc nécessaires pour savoir quels sont les éléments à apporter en fonction du site et du projet d’hydroélectricité. Ce dossier doit généralement étudier l’incidence des travaux sur l’écosystème local et peut conduire à une demande d’installation d’équipements complémentaires en fonction de l’état administratif du site. Celle-ci est également renforcée par un relevé́ topographique du site (dimensions de la prise d’eau, hauteur de chute brute).
Cela permet aux autorités compétentes de prendre connaissance du projet et, si nécessaire, de formuler des observations avant qu'une autorisation ou une décision ne soit prise.
En résumé, le porter à connaissance pour un moulin est une procédure qui permet d'informer et de consulter les autorités compétentes concernant un projet de construction ou de modification d'un moulin, afin de s'assurer qu'il respecte les normes environnementales, urbanistiques et patrimoniales en vigueur. Il permet d’obtenir l’arrêté préfectoral permettant de l’hydroélectricité.
Conclusion
Le droit d’eau est une notion complexe mais cruciale pour toute exploitation hydraulique en France. Il permet non seulement de garantir une utilisation juste et légale des ressources en eau. Pour tous types de moulins hydrauliques, il est indispensable de se conformer à la réglementation en vigueur, donc de faire reconnaître son droit d’eau et d’étudier les incidences du projet hydroélectrique sur l’environnement, pour exploiter la force motrice de l’eau et produire son hydroélectricité en toute légalité.